
À quatre jours du référendum constitutionnel prévu le 21 septembre, la scène politique guinéenne est marquée par une fracture profonde. Depuis son exil, l’opposant historique Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG), a lancé un appel au boycott, qualifiant le scrutin de « mascarade » destinée à légitimer le pouvoir du général Mamadi Doumbouya, auteur du coup d’État de 2021.
Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, l’ancien Premier ministre a exhorté ses partisans à ne pas se rendre aux urnes, affirmant que même un vote « non » serait interprété comme un soutien au projet constitutionnel.
Quelques heures plus tard, c’est au tour de l’ancien président, Alpha Condé d’adresser une diatribe contre les putschistes. Cette posture radicale, qui rejette toute participation au processus, soulève des interrogations sur les enjeux politiques, la légitimité du scrutin et les perspectives démocratiques du pays.
Le gouvernement guinéen présente ce référendum comme une étape décisive vers le retour à l’ordre constitutionnel, après quatre années de transition militaire. Plus de 6,7 millions d’électeurs sont appelés à se prononcer sur un texte censé refonder les institutions et ouvrir la voie à des élections générales en 2026.
Mais pour Cellou Dalein Diallo, ce projet n’est qu’un « paravent constitutionnel » destiné à prolonger le règne du général Doumbouya. Suspendu du jeu politique depuis fin août, l’UFDG dénonce un climat de répression, la fermeture des médias indépendants et l’absence de garanties démocratiques. Le boycott devient ainsi un acte de résistance, une manière de délégitimer un processus jugé verrouillé et biaisé.
L’appel au boycott n’est pas sans précédent dans l’histoire politique guinéenne. Il traduit une stratégie de rupture, visant à priver le scrutin de sa légitimité populaire. En refusant de participer, l’opposition espère affaiblir la crédibilité du résultat et dénoncer l’absence de pluralisme.
Cependant, cette posture comporte des risques : elle pourrait marginaliser davantage l’UFDG, réduire sa capacité d’influence institutionnelle, et laisser le champ libre à la junte pour consolider son pouvoir. Le gouvernement, de son côté, intensifie sa campagne pour le « oui », multipliant les meetings et les appels à la mobilisation citoyenne.
Le bras de fer entre la junte et l’opposition se joue désormais sur le terrain de la participation. Une forte abstention pourrait être interprétée comme un rejet du processus, tandis qu’une mobilisation massive renforcerait la légitimité du texte et du pouvoir en place.
Pour les partisans de Cellou Dalein Diallo, le boycott est un signal fort : celui d’un refus de cautionner un « second coup d’État » déguisé en réforme constitutionnelle. Pour le gouvernement, il s’agit au contraire d’un pas vers la normalisation institutionnelle, malgré les critiques sur la transparence et l’inclusivité du processus.
Au-delà du référendum, la décision de l’opposant met en lumière les fragilités du processus démocratique en Guinée. Elle pose la question de la place des voix dissidentes, du rôle des institutions électorales, et de la capacité du pays à organiser des consultations réellement pluralistes.
Le scrutin du 21 septembre ne sera pas seulement un vote sur une nouvelle constitution. Il sera aussi un test de légitimité, de confiance et de maturité politique. Entre participation et abstention, les électeurs guinéens auront à trancher et à écrire une nouvelle page de leur histoire nationale. Fin