
Les signes d’une tension entre Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko ont agité l’espace public ces derniers jours. Entre les commentaires enfiévrés, les analyses partisanes et les interprétations passionnées, une chose demeure certaine : cette friction, réelle ou supposée, raconte quelque chose de profond sur la vie politique sénégalaise.
Nul ne peut nier qu’Ousmane Sonko reste la figure centrale du projet PASTEF. Il est celui dont la voix a porté un mouvement au-delà de ses frontières idéologiques, celui qui a transformé une contestation en force politique, celui dont le charisme a préparé le terrain pour l’élection de Bassirou Diomaye Faye. D’où cette tentation, parfois insistante, de rappeler publiquement que c’est lui qui a fait de Faye un président. Pour certains, Sonko en fait trop, au point de brouiller la frontière entre leadership de parti et respect du président en exercice. Pour d’autres, il ne fait que dire la vérité : l’histoire politique du Sénégal ne peut s’écrire sans lui.
Face à ce mentor trop présent, Faye apparaît comme un homme calme, mesuré, presque trop discret. Ses détracteurs voient en lui un leader “mou”, trop dans l’ombre de Sonko. Ses partisans, au contraire, y lisent une force tranquille : celle d’un homme qui avance sans bruit mais qui trace sa propre voie. Et c’est là que se joue une partie décisive : Faye peut vouloir, légitimement, montrer qu’il est le président, pas le lieutenant. Dans toute relation mentor–protégé, vient un moment où l’élève doit reprendre l’espace qu’on lui doit.
Ces mouvements de tension ne sont pas inédits en Afrique ou ailleurs. Quand deux figures arrivent ensemble au pouvoir, la cohabitation est toujours fragile. L’exemple ivoirien est récent et parlant : Ouattara et Guillaume Soro ont lutté ensemble pour arriver au pouvoir, mais lorsque le moment est venu de structurer l’État, le président a dribblé le compagnon de lutte, jusqu’à la rupture totale. D’autres exemples abondent : en RDC, la rupture rapide entre Félix Tshisekedi et Joseph Kabila malgré leur accord initial ; au Burkina Faso, les relations complexes entre Blaise Compaoré et Thomas Sankara avant l’issue tragique ; en Guinée, la prise de distance entre Alpha Condé et son ancien allié Sidya Touré ; au Ghana, l’éloignement progressif entre Rawlings et John Atta Mills, pourtant formé dans son ombre. La politique est un terrain mouvant où les alliances sont aussi solides que les intérêts qu’elles servent.
La différence au Sénégal, c’est que les institutions tiennent, la société civile est vigilante et l’opinion publique extrêmement réactive. Ce qui ressemble à une brouille n’est peut-être que l’expression normale d’une cohabitation politique dynamique, d’un partage de pouvoir en construction. Si Sonko montre qu’il garde la main sur PASTEF, Faye peut lui aussi montrer qu’il gouverne en président, et non en simple héritier politique. Cette dialectique peut devenir une crise ou, au contraire, une preuve de maturité démocratique.
Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : l’actualité politique sénégalaise ne manquera pas de rebondissements dans les jours, les semaines et les mois à venir. Entre stratégie, ego, loyauté et ambition, le duo Faye–Sonko ouvre un nouveau chapitre où tout peut arriver. Fin
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